Douter pour accompagner
Publié par FCV le
DOUTER POUR ACCOMPAGNER
La richesse de l’accompagnement passe, entre autre, par le doute. Douter n’est pas une faiblesse, mais une nécessité. En somme, une hygiène de vie…
Douter évite de se prendre pour ce que l’on n’est pas. Le doute retient. Il suspend le cours des choses. Il crée de l’ouverture. Il invite à l’humilité et questionne toute complaisance envers soi-même. Douter met de la distance. Point trop n’en faut me direz-vous ? En effet, trop douter et c’est la chute ! Mais pas assez douter, c’est faire le lit de la toute puissance ! Il y a ainsi douter, et douter. Il s’agit, pour le coach de vie, de douter suffisamment afin de questionner sa posture et la réactualiser, sans oublier que pratiquer le doute permet de découvrir la vertu de l’ajustement.
Se tenir dans le doute, pas par fascination du flou ou du néant, mais pour introduire du jeu et de l’incertitude dans ce qui se fige et s’immobilise en soi. Et si douter était un acte de résistance ? Une façon de prendre congé du totalitarisme que peut représenter parfois la certitude.
Il s’agit de douter pour laisser de la place à l’inconnu, à l’énigme présent en soi et en l’autre, pour consentir au réel c’est-à-dire à ce qui advient, surgit et étonne. Douter facilite l’émerveillement et laisse de la place à ce qui surprend. Douter, c’est consentir à accueillir ce qui est en mouvement. C’est poser un oui sans condition à l’existence et avoir foi dans l’infini et la multiplicité des possibles. Douter n’est-ce pas alors avoir foi en la vie ? N’est-ce pas limiter l’illusion que l’on peut tout expliquer ? Et si douter c’était s’éloigner de l’arbitraire ? La fécondité viendrait-elle du doute ? Toute avancée ne serait-elle pas un doute surmonté, traversé et dépassé ? Si l’avenir n’appartient pas au doute, celui-ci contribue en revanche à sa richesse.
Douter et croire semblent antinomiques. Et s’ils étaient naturellement complémentaires ? Douter pour croire… Douter n’est pas rendre muet son présent. C’est lui accorder de l’espace, du temps pour « laisser se dire et se faire ».
Dans l’accompagnement, la position de la certitude est dramatique. Faire l’économie du doute, c’est se dérober à son humanité. Le doute oblige à se vivre de l’intérieur, à se poser en ce lieu où l’on est assuré de rien : là où précisément la certitude est en jachère. C’est un lieu où « ça bouge et ça questionne ». Douter n’est pas se résigner. Douter est une action : c’est dire oui à ce qui se questionne. Le doute ne clôt pas, il ouvre.
« LE DOUTE NE CLÔT PAS, IL OUVRE »
La création s’inspire du mouvement du doute. Ce dernier est en quelque sorte une page blanche. Qu’allons-nous écrire ? Et surtout allons-nous écrire avec une conscience renouvelée ?
Il convient de reconnaître que le doute véhicule bien alors des ambiguïtés. Au premier regard, le doute renvoie autant à la faiblesse qu’à l’impuissance. Cependant il existe une autre facette : celle de réveiller en soi ce qu’il y a d’humain.
La relation d’accompagnement se nourrit d’humanité lorsqu’elle fait de la place à l’autre, lorsqu’elle pose la foi en l’autre comme un des fondamentaux de sa posture. Il y a dans la foi en l’autre une façon d’accueillir, d’accepter et de dire oui. Dire oui à quelque chose de plus grand, à quelque chose qui élève et transforme. Douter, c’est laisser de la place à l’étrangeté de l’instant, c’est renoncer à la certitude quelque fois sclérosante, c’est poser un rapport à la vie différent.
Dans l’accompagnement, douter, c’est interroger notre rapport à la foi en l’autre. Le doute impose le silence à une parole inutile, encombrante et étouffante, à une parole « sauveuse » au détriment du respect de l’autre.
Sans le doute, l’accompagnement n’existe plus. Douter, c’est accepter de perdre, de renoncer à sauver l’autre. C’est pratiquer un acte de foi qui consiste à croire que l’autre peut accoucher de lui-même.
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