Le premier rendez-vous ou le désenlisement amorcé.

Publié par FCV le

LE PREMIER RENDEZ-VOUS OU LE DÉSENLISEMENT AMORCÉ.

La présence d’un client face à son accompagnant, pour un premier rendez-vous, est déjà une situation qui fait rupture avec son enlisement(1). Nous accueillons alors un sujet chez qui le basculement(2) a déjà opéré. De l’intérieur se rouvre un passage où le mouvement de l’évolution commence à se déployer. Notre rôle est de l’accompagner.

Le renversement a eu lieu. Celui-ci pousse le client à prendre rendez-vous. Nous l’accueillons une fois cet évènement passé. C’est un fait que nous devons, professionnels de l’accompagnement, intégrer et prendre en considération.

 Le fait que le client soit face à son accompagnant, le basculement est avéré. Le mouvement est amorcé même si le client ne le repère pas. A-t-il cerné ce basculement ? Pour la plupart des cas, pas encore ! Il est étonnant de constater que le client se vit toujours dans l’épaisseur de l’enlisement(2), dans le cloaque du problème, dans la désespérance d’une réminiscence. Il est curieux de constater que le mouvement de basculement opère en silence et avance masqué. Pour le client, le rendez-vous avec l’accompagnant se vit, à son niveau, comme l’étape de la dernière chance ! Le client est encore le nez dans son problème alors qu’une partie de lui-même est déjà dans une dynamique nouvelle. « Je me sens au bout du rouleau ». « Je me vis coincé et je suis désespéré ». « Je viens vous voir car je n’ai pas de solutions à ma situation ». Les propos marquent généralement l’enlisement, l’échec des tentatives menées jusqu’alors, la stérilité des solutions imaginées. Prisonnier d’une spirale désespérante, le client n’a pas conscience le plus souvent que la situation s’est renversée dès lors qu’il a pris le rendez-vous.

Est-ce un décalage entre les faits et le vécu ? Le client vit un retournement non détecté. Pourquoi ne repère-t-il pas ce mouvement ? Pourquoi ce passage de l’enlisement au retournement se déroule-t-il généralement dans une absence de conscience ? Bien sûr, le client n’est pas sensé savoir qu’une situation enlisée abrite son retournement, qu’une question véhicule l’embryon de sa réponse, que l’un possède en lui son opposé, que l’un peut devenir l’autre et… inversement.

Ce phénomène montre que rien ne reste immobile, que tout contient son contraire et ce qui s’oppose aujourd’hui devient complémentaire demain. Il est question de basculement et d’inversement. Est-ce d’ailleurs une rupture ou plutôt le passage d’un état à un autre ? Ce mouvement s’inscrit dans la temporalité d’une histoire qui engendre, enlisements, basculements et transformations à l’infini.

C’est l’épisode qui le fait souffrir qui l’incite à prendre rendez-vous mais il ne perçoit pas que c’est le mouvement du basculement lui-même qui recherche un témoin à son renversement. Autant dire qu’il y a maldonne, quoique… Et si c’était simplement la continuité du processus qui tenait à se manifester? Comme si cette mutation désirait opérer dans un contexte approprié à son épanouissement. La solution du problème a-t-elle déjà les rênes en main ? Autant dire que du côté de l’accompagnant, il y a « pas grand-chose à faire », juste accueillir le déroulé de l’histoire, et plus encore, le mouvement de celle-ci. Accepter, accueillir ce qui surgit et renvoyer l’énergie du mouvement au client, tel est notre rôle d’accompagnant-témoin bienveillant. Il n’existe rien de plus précieux que d’accompagner le mouvement déjà enclenché par la prise de rendez-vous,  sans le saisir et sans l’influencer.

La sobriété, l’humilité et la délicatesse s’invitent à ce moment précis et nourrissent la posture de l’accompagnant. Laisser se faire ce qui se fait… Le changement est à la hauteur de ce qui se délie pour se relier ailleurs et autrement. Irréversible instant que ce renversement : il y a fléchissement d’une position afin qu’une autre s’élabore et s’incarne.

Tout découle alors de ce basculement et il a lieu subrepticement, presque à la dérobée, et le premier fait marquant est ce premier rendez-vous avec l’accompagnant. Ce dernier doit être vigilant à ne pas accorder une trop grande importance à la somatisation évoquée, au problème énoncé, afin de ne pas renvoyer le client à son enlisement. Cela serait de la part de l’accompagnant, excluant et réducteur.

La responsabilité du professionnel tient à la largesse et grandeur de son accompagnement. Répond-il à la partie souffrante de l’histoire ou accueille-t-il le mouvement général de celle-ci ? N’est-il pas là pour témoigner, dans un relationnel confiant et humaniste, du basculement opéré grâce à ce premier rendez-vous ? L’accompagnant, de part sa présence, officialise le désenlisement en cours : il est un curseur sur la ligne du temps, un regard humain posé sur une expérience de vie.

Roger DAULIN – Coach de vie et formateur

(1) Note : Toutes les situations en coaching de vie ne se présentent pas comme enlisées ! Le thème de « l’enlisement » décrit seulement le contexte de certaines demandes de coaching de vie.

(2) En référence aux termes utilisés par François Jullien dans son livre : Vivre en existant – une nouvelle éthique – Ed Gallimard

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